samedi 24 février 2018

La forme de l'eau : une histoire d'amour singulière, magnifique ode à la différence.

Elisa est femme de ménage dans un laboratoire gouvernemental ultra-secret. Elle est muette. Ses seuls amis sont son voisin solitaire, bien plus âgé, et sa collègue de travail, Zelda. Un jour arrive dans le laboratoire un étrange caisson rempli d'eau. A l'intérieur, une étrange créature amphibienne. Petit à petit va naître une relation forte entre la créature et Elisa...

Conte fantastique, La forme de l'eau est avant tout une histoire d'amour, vraiment singulière. Une ode à la différence.

Les événements du film sont situés dans l'Amérique des années 60, en pleine guerre froide (avec ses espions infiltrés, la conquête de l'espace), dans un pays marqué par les émeutes raciales. Un cadre approprié pour une histoire qui nous interroge : qui sont les vrais monstres, qui sont les vrais méchants ? Car le monstre n'est pas celui dont l'apparence peut nous rebuter, c'est celui qui fait preuve de monstruosité dans ses actes. En l'occurence, c'est bien le personnage incarné par le génial Michael Shannon qui est le monstre de l'histoire : raciste, sexiste, cruel.

Ode à la différence, le film invite à aller au-delà des apparences. Un message salutaire, dont la pertinence s'étend bien au-delà des années 60 et entre en écho avec les réflexes de peur et de repli sur soi qui refont dangereusement surface aujourd'hui...

Finalement, qu'est-ce qui fait de nous des humains ? Que dire d'Elisa, qui se dit "incomplète" parce qu'elle est muette ? Et de cette créature, avec son apparente monstruosité, qui ne peut pas être à l'image de Dieu (évidemment, Dieu a forcément l'apparence d'un homme blanc !!!).

Le film parle aussi de solitude (notamment à travers le personnage de Giles, le voisin d'Elisa... et Elisa elle-même, à cause de son handicap), d'amitié, d'exclusion, de vieillesse...

On retrouve l'esthétique et l'ambiance si personnelles de Guillermo del Toro, avec une magnifique photographie. Et puis sa fascination pour les monstres, l'évocation de la cruauté dont sont capables les hommes. On pense forcément au Labyrinthe de Pan, ou ses deux Hellboy (la créature amphibienne rappelle beaucoup le personnage d'Abe Sapien... et est incarnée par le même acteur, Doug Jones !). Plusieurs scènes sont absolument magnifiques : poétiques et oniriques. [spoiler] Je pense par exemple à ce moment magique lorsque Elisa tente de dire à haute voix son amour et qu'elle se retrouve comme projetée dans une comédie musicale où elle chante et danse avec son bien-aimé. [/spoilerOu, bien-sûr, la superbe scène finale, que je ne dévoilerai pas... mais qui est d'une grande poésie.

Au niveau du casting, j'ai déjà mentionné Michael Shannon. Sally Hawkins est très touchante dans le rôle d'Elisa, Octavia Spencer truculente et Michael Stuhlbarg, comme toujours, excellent (pour moi, c'est un des meilleurs seconds rôles du cinéma américain !). Enfin, la musique originale est encore une très jolie réussite du prolifique Alexandre Desplat.

Un film magnifique.

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